lundi 26 mars 2007 par Le Nouveau Réveil

Sauf bouleversement politique de dernière heure, le secrétaire général des Forces nouvelles, qui est l`un des 5 leaders politiques du G7, sera désigné comme nouveau Premier ministre de la Côte d`Ivoire. Un Premier ministre issu donc de l`opposition ivoirienne regroupée au sein du G7. Mais véritablement, comment et pourquoi en est-on arrivé-là ?

"Dans le chronogramme, c`est prévu que le Premier ministre soit nommé à la fin de ce mois et que le gouvernement soit formé dans la première semaine du mois d`avril. Je pense que les engagements seront tenus". Telle est l`information, du reste capitale, lâchée jeudi dernier par le ministre burkinabé de la Sécurité, Djibrill Bassolé qui, au nom du facilitateur du dialogue direct, le Président du Faso et chef de l`Etat Blaise Compaoré, avait reçu jeudi en audience M. Abou Moussa, représentant par intérim du secrétaire général des Nations Unies en Côte d`Ivoire et M. Stoudmann, Haut représentant des Nations unies pour les élections dans notre pays. Une déclaration largement relayée par la presse ivoirienne et par les confrères internationaux. Parce qu`elle est importante, mais aussi parce qu`elle met fin à toutes les supputations et à toutes les rumeurs. Gbagbo Laurent restera confortablement dans son fauteuil de Président de la République et Soro Guillaume, avec qui il gère les deux blocs de la Côte d`Ivoire depuis le 19 septembre 2002, sera nommé, disons plutôt désigné Premier ministre dans quelques jours seulement. Ouaga a donc coupé la poire en deux. Le pouvoir est divisé en deux. Les deux chefs des deux parties armées et belligérantes auront à gérer. Pour Gbagbo, la présidence de la République, et pour Soro, la Primature. Sous la forme d`une simple collaboration ? " Non, Soro ne sera pas et ne se comportera pas comme un collaborateur aux ordres de Gbagbo. Il se comportera plutôt comme un opposant à Gbagbo qui exercera une forte pression sur lui pour qu`enfin on arrive à l`organisation d`élections justes, transparentes et crédibles", nous a confié hier une source bien introduite dans le "DDO". Et qui ajoutera d`ailleurs que " contrairement à Seydou Diarra et à Charles Konan Banny qui étaient des Premiers ministres indépendants, voire impartiaux, Soro Guillaume est et se reconnaît comme un Premier ministre de l`opposition, issu donc du G7. Et comme tel, il ne fera rien sans l`avis des leaders politiques de ce groupement politique. Ses succès seront les succès du G7 et ses échecs seront les échecs du G7. Il faut donc que le G7 fasse bloc derrière lui pour ne pas paraître ridicule aux yeux du camp Gbagbo et aux yeux de la communauté internationale, surtout que celle-ci a trouvé l`opposition ivoirienne passive et molle bien que des situations en or se soient présentées à elle pour renverser la situation socio-politique et parfois même chasser le régime FPI du pouvoir. L`opposition ivoirienne a failli. Elle doit à présent s`adapter à la nouvelle donne politique issue de Ouaga. Une pilule dure à avaler pour certains partis politiques qui ont espéré toujours en la résolution 1721, mais qui, hélàs, en réalité, deviendra un très vieux souvenir dans quelques heures ou si nous voulons être gentil dans quelques jours. C`est une réalité implacable que l`on ne saurait cacher à l`image du soleil que la main, même la plus large, ne peut cacher.

Du partage du pouvoir

Les discussions sur le cadre institutionnel de l`accord de Ouaga qui démarrent ce lundi devront aboutir absolument à un "partage équitable" du pouvoir exécutif. Soro ne sera pas aux ordres de Gbagbo, nous indique-t-on ici. Soro ne sera pas en tandem avec Gbagbo, car une quelconque compromission acceptée par le Premier risque de lui être fatale et d`être fatale à ses combattants et aux non combattants qui l`ont soutenu dans sa lutte d`une manière ou d`une autre. Le gouvernement que Soro Guillaume sera amené à composer et à proposer à Gbagbo dans la première semaine du mois d`avril pourrait comprendre, nous a-t-on confié, hier, 31 membres y compris Soro lui-même, Premier ministre. Le camp Gbagbo comprenant le FPI, le PIT, l`UDCY et les autres partis satellites auront 15 ministères à se partager. A Gbagbo de distribuer les portefeuilles qu`il obtiendra à ses alliés à qui il a demandé de lui faire confiance et de ne faire aucun bruit pour ne pas paraître ridicule. Les 15 autres portefeuilles ministériels tomberont dans l`escarcelle de Soro Guillaume, Premier ministre issu et imposé (appelons un chat un chat puisque les partis politiques du G7 ont été tous mis devant le fait accompli) qui aura à charge de distribuer aux Forces nouvelles (la charité commençant bien sûr par soi même) au PDCI-RDA, au RDR, à l`UDPCI et au MFA. Le quota à définir sera proportionnel, nous a confié une source proche de la présidence burkinabé, au poids de chaque formation politique. " Mais Soro et Gbagbo restent sur la posture de 31 membres du gouvernement, et que le FPI et ses petits partis politiques alliés doivent se tailler la part du lion avec 15 ministres contre 15 pour le grand groupe du G7, il va s`en dire que le PDCI-RDA et le RDR risquent d`être les grands perdants, parce qu`il n`est dans ce cas-là pas si sûr qu`ils puissent chacun avoir 5 ministères ou plus. D`où le Premier ministre issu du G7 devra peser de tout son poids afin que le présent et nouveau gouvernement soit une photocopie du gouvernement de Marcoussis où chaque partie a eu droit à un quota tenant compte de son poids réel. Il se dit aussi clairement ici qu`aussi bien des femmes et des jeunes doivent occuper une place de choix dans le présent gouvernement. Le Premier ministre et chef du gouvernement ne cumulera pas de postes cette fois-ci, nous dit-on. Enfin, le cadre institutionnel prévoit clairement, comme l`indique l`accord, une sorte de conseil présidentiel faisant des présidents Bédié (du PDCI-RDA) et de Ouattara (du RDR), des présidents d`institutions avec tout ce que cela comporte comme avantages. Là où les discussions pourront achopper dans le second round, c`est au niveau de la présidence ou non de certains conseils des ministres ou encore de certains pouvoirs que Ouaga doit concéder au Premier ministre Soro Guillaume. C`est à partir d`ailleurs des décisions qui seront prises à ce niveau que l`on jugera de la crédibilité ou non de cet accord. Quels pouvoirs Soro arrachera-t-il, à Gbagbo ? Quels pouvoirs Gbagbo acceptera-t-il bien volontiers, de céder ? Certaines de ses prérogatives et pouvoirs régaliens de Président de la République au nouveau et tout Premier ministre véritablement opposant ? Tout se décide ce lundi ou demain mardi ici à Ouaga. " Mais, attention, si Gbagbo lâche facilement certains des pouvoirs à Soro au cours des échanges dans l`élaboration du cadre institutionnel, c`est là qu`il faut surtout commencer à s`inquiéter, et pour Soro, et pour toute l`opposition, et pour les lendemains des pourparlers de Ouaga ", ferme observation d`un membre de l`opposition politique burkinabé qui, comme tous les autres Ivoiriens, fait savoir que " Gbagbo ne fait rien au hasard. Gbagbo ne lâche rien au hasard. Toutes ses décisions reposent sur des calculs politico-politiciens ", conclut notre interlocuteur à la fois pessimiste et optimiste sur le dialogue direct. Gbagbo n`a-t-il pas lui-même affirmé, lors de la signature du contrat Trafigura-Etat de Côte d`Ivoire, que tout ce qu`il fait ne repose que sur la politique et que la politique est son travail, conscient selon lui qu`en politique, rien ne repose sur la sincérité ?
Demain nous situera certainement. Pour l`instant ici à Ouaga, chacun retient son souffle.

Denis Kah Zion à Ouagadougou

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