mardi 3 avril 2007 par Le Nouveau Réveil

Je voudrais m'incliner avec respect devant la haute autorité du royaume baoulé et m'autoriser à porter un regard citoyen sur toutes les interventions que nous avions enregistrées ça et là à la suite du rassemblement du Royaume Baoulé à Yamoussoukro, le 24 Mars 2007, avec l'appui de la Grande Cour Akan et de leurs alliés. Les avis sur les motivations de ce rassemblement sont divers à la lecture des journaux et à l'écoute des radios et télévisions.
Ce qui retient mon attention, ce sont les avis des originaires de l'espace baoulé parce qu'ils n'ignorent pas les souffrances des populations. Il est vrai que les avis des autres sont importants, mais les porteurs de ces avis ont l'excuse de ne pas vivre directement un certain nombre de choses.
Je voudrais m'attarder sur les réactions écrites ou orales tenues par Jean-Baptiste AKROU dans les colonnes de Fraternité Matin du jeudi 29 mars 2007, celles de Watchard Kedjébo et de Christine Konan, organisatrice de la rencontre des femmes dites de Sakassou chez le Chef de l'Etat. A la vérité, je voudrais m'associer aux observations de Jean-Baptiste qui voulait tout simplement attirer l'attention du Royaume Baoulé et des Akan en général sur les propos indécents et discourtois tenus par l'un des leurs au cours de cette manifestation. Il exprime en même temps l'inquiétude que de tels propos pourraient nuire à la noblesse des motivations qui sous-tendent cette manifestation du Royaume ; jetant dans une certaine mesure le discrédit sur l'élan de respect et de considération de l'autre, vertu cardinale du peuple baoulé. Je comprends qu'il a pris la peine de lire les déclarations de sa Majesté Nanan ANOUGBLE III. Je l'en remercie pour sa contribution constructive à une meilleure compréhension de l'objet de cette rencontre. Par contre, les réactions de Christine Konan et de Watchard Kedjébo sont des plus surprenantes parce que tout simplement insultantes et inacceptables pour le peuple, devenu dans leur conscience, le mouton du sacrifice, soit pour consolider un poste ou même le conquérir, soit pour amplifier l'élan de mendicité que l'on a subitement découvert chez les populations baoulé. Vous n'avez qu'à échanger avec les mendiantes des carrefours d'Abidjan pour vous rendre compte que ce peuple est en train de perdre sa dignité. Je ne vous apprends rien, la mendicité est un sacrilège dans notre culture. En général, le Baoulé préfère la mort au métier de "alla di alla man". Comment comprendre que Christine Konan, la toute puissante femme de la République de Côte d'Ivoire, enfonce nos populations dans un tel schéma en s'amusant à les banaliser sous le regard de son maître ?
Est-elle vraiment de sang baoulé ? Je voudrais dire en passant que le Royaume baoulé n'appartient pas aux Baoulé de Sakassou et que d'autres cours, d'égale importance, portent des populations baoulé.
Christine Konan peut-elle dire devant Dieu et devant les Hommes qu'elle ignore que depuis 2004, les Baoulé sont l'objet incessant de massacres (de 523 tués en 2006, on enregistre à ce jour 1221 tués), que 875 hectares de plantations sont arrachées par les wê, pour la plupart cadres et même ministres en 2006, et 3 651 hectares de plantations dépossédées à ce jour ? Pourquoi ce sont les non-Krou qu'on tue ? Ça, ce n'est pas tribal ?
Christine Konan ignore-t-il également que depuis l'avènement au pouvoir de son parti, 2 800 cadres Akan n'ont plus de postes dans l'Administration ivoirienne ? Aussi, ne se rend-t-elle pas compte que les jeunes diplômés akan sont exclus des concours administratifs donnant accès aux emplois publics ; Ne sait-elle pas que le café et le cacao qui ont produit les richesses que tout le monde pille et pour lesquelles les gens se battent sont à 70% le résultat de la sueur des planteurs baoulé, voire akan ?
A-t-elle déjà oublié que l'électricité qui éclaire la Côte d'Ivoire et qui fait la fierté de tous est la marque de la souffrance du peuple baoulé ? Rappelez-vous que pour réaliser les barrages de Kossou et de Taabo, le Président Houphouët-Boigny a sacrifié de nombreux villages baoulé du Centre en déportant leurs ressortissants dans les forêts noires de San Pedro. Ils sont devenus des exilés dans leur propre pays. Ce peuple a accepté ce sacrifice pour des raisons de développement national. D'où vient qu'on parle de tribalisme au moment où les Baoulé et la Grande Cour Akan se retrouvent pour échanger, entre autres sur ces questions pour lesquelles le Chef de l'Etat, Laurent GBAGBO, a envoyé des émissaires auprès du Royaume baoulé ?
Croit-elle vraiment que si le peuple baoulé est resté silencieux jusque-là, c'est par ignorance ou faiblesse ? Je voudrais dire, de faire attention parce que ce grand peuple a les capacités de réagir de la manière la plus regrettable pour tous, si l'on continue de le vilipender pour des raisons inavouées.
Aujourd'hui encore, on constate que 380 burkinabé viennent d'être réinstallés dans leurs plantations alors que les planteurs baoulé demeurent loin de leurs plantations. A-t-elle vraiment l'intelligence pour nous expliquer tout ce qui se passe, au lieu de parler de tribalisme et de manipulation honteuse ?
Comment peut-elle imaginer que de hauts dignitaires Akan se retrouvent à une rencontre de telle qualité pour des futilités matérielles ? Christine Konan veut-elle utiliser le sang des Baoulé pour sécuriser son poste dans la République ou marcher sur le corps inerte des Baoulé pour se nourrir ? C'est ignoble et méchant.
J'estime que si Christine Konan était de sang pur baoulé, elle ne serait pas indifférente des faits ci-dessus indiqués. Autant elle a pris l'initiative de répondre au rassemblement des Baoulé à Yamoussoukro en présence du Chef de l'Etat, elle aurait été spontanée auprès de celui-ci pour le règlement des douloureux problèmes que vivent les populations baoulé dans la zone forestière ouest montagneuse. Pour mémoire, seul le Roi d'EBRA en a pris l'initiative auprès du Chef de l'Etat.
Christine, je voudrais te faire une confidence : au moment où tu ris du Baoulé à la Présidence, sache que d'autres populations de l'ouest sont en train d'arracher astucieusement les plantations aux Baoulé (leurs enfants prétextent avoir découvert plus de superficies que nos populations ont réellement reçues de leurs parents. Ils leur vendent le surplus à un million de francs l'hectare autrement la plantation est confisquée).
Je voudrais te faire une suggestion que tu pourras proposer au Chef de l'Etat, en ta qualité de juriste, s'il pense que la question de l'entreprise agricole des Baoulé de l'ouest ne peut pas trouver de solution. Il s'agit simplement d'utiliser le parallélisme des formes. Le Royaume baoulé appuyé de la Grande Cour Akan pourrait demander à ses populations d'abandonner les plantations (leurs biens) pour lesquelles ils ont tout donné, aux originaires de ces différentes régions. En retour, les biens appartenant aux originaires de ces régions, réalisés dans l'espace akan pourraient de la même manière revenir aux Akan, originaires de ces régions. Ainsi, chacun sera heureux de vivre chez soi sans ranc?ur. Ce n'est pas de la plaisanterie. Nous y veillerons le moment venu.
La dernière chose que je voudrais dire, c'est que nous apprenons de façon récurrente que l'Etat veut construire le Palais du Royaume baoulé. Si tel était le cas, ce serait dommage pour tous ceux qui n'ont pas pu éclairer les gestionnaires de l'Etat pour ce que dans notre culture, les biens du Royaume sont uniquement l'oeuvre de ses fils. Il n'émane ni de l'Etat, ni de personne privée non originaire du Royaume au risque d'assujettir l'autorité royale.
Sachez enfin que l'unité du Baoulé, de la Grande Cour Akan et de leurs alliés est en marche pour l'obtention d'une paix véritable et durable. Que Dieu vous éclaire et que sa justice vous guide.

N'Guessan Luc
Cadre baoulé

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