mardi 3 avril 2007 par Le Front

Faut-il revenir sur ces années de braise au cours desquelles notre pays défiguré, déchiré, embrasé par des sentiments de haine et de méfiance, s'est retrouvé l'otage d'individus sans foi ni loi, tuant, violant, nourris au sang des autres ? Chacun de nous les a suffisamment vécues dans son corps et sa chair pour en garder, encore aujourd'hui où l'on parle d'une paix à nos portes, des stigmates brûlants. Inutile donc de revenir sur ces années de violence et de doute pour la Côte d'Ivoire, ce pays dont Houphouët Boigny avait fait un havre pour tous et une oasis pour les chercheurs, Africains ou non, de fraternité, de liberté et surtout de prospérité.



La paix serait donc là. Et pour être plus positif, disons simplement : la Paix est là. Née du ??Dialogue Direct'' à Ouaga, enfant, dit-on, de plusieurs pères, cette paix-là, nous paraît vouloir vivre et se développer car nettoyée de toutes les scories qui l'empêchaient jusqu'à présent de croître, et expurgée, semble-t-il, des vilains sentiments qui l'enlaidissaient jusqu'à la réduire à néant.
L'espoir que l'Accord de Ouagadougou fait naître en chacun de nous est grand et vif. Parce que nous sommes fatigués du spectacle peu honorable des tangos et valses dont nous honoraient la classe politique et les ténors de la société civile, imperméables aux sacrifices à consentir sur leurs ambitions au profit de ceux et de celles qu'ils disent représenter partout.

Aujourd'hui qu'une lueur de guérison point, que devons-nous faire pour la transformer en une lumière forte et durable, la lumière de la Paix ?

1 ? D'abord le gouvernement
Plutôt qu'un aréopage de personnalités hétéroclites aux intérêts divers comme il nous l'a été donné de voir, Laurent Gbagbo et Guillaume Soro devraient s'atteler à mettre en place un gouvernement d'hommes et de femmes désireux d'?uvrer pour le pays, d'apporter des compétences reconnues, d'user de leurs expériences établies à la réalisation d'un cahier de charges et d'un chronogramme compris de tous et acceptés par tous.
Un gouvernement-commando donc, fondé sur la cohésion, la discipline et l'abnégation. Car les défis sont nombreux et importants :
- l'Insécurité à éliminer : nous vivons, chaque jour, l'angoisse du braquage, de l'agression, la peur de mourir pour un bout de pain, la crainte de prendre la route et d'y rencontrer les coupeurs de route ;
- la Corruption à ??tuer'' : gangrène de tous les corps de l'Etat, aucun secteur n'est, aujourd'hui, à l'abri du ??fais-nous-fais'' ;
- la Justice à revêtir de sa toge de d'exemplarité, d'équité, de probité et d'honneur ;
- le nouveau mal à circonscrire rapidement : le Tribalisme, dont on se prend à chanter les mérites dans des enceintes populaires ;
- la Circulation des biens et des personnes à rendre fluide ;
- l'Education à repenser : actuellement bloquée et inopérante, elle jette à la rue des citoyens de demain dont l'étendard est la machette et l'ignorance ;
- l'Agriculture à redorer, pour redevenir les fondements du succès économique de notre pays ;
- la Communication : il s'agira, dans ce cas précis, de permettre l'expression plurielle, sur une base équitable et transparente, afin d'éviter que des rancoeurs naissent à nouveau. Parce que le pays entre dans une période électorale, donc sensible, il importe qu'un accent particulier soit mis sur l'utilisation des Médias d'Etat d'abord et des médias privés ensuite, pour que le traitement de l'information s'adapte aux besoins réels des populations et évite les actes de nature à les heurter. La communication sera donc élaborée de manière à acquérir l'adhésion de tous, à redorer l'image du pays et à favoriser le développement d'une presse responsable, une presse qui ne sera pas obligée de recourir à des moyens douteux pour s'exprimer. Il va s'en dire que le succès de ce Gouvernement reposera en grande partie sur l'efficacité de sa stratégie de communication, d'information et de sensibilisation.

2 ? Ensuite, le peuple :
Les Ivoiriens et leurs hôtes devront, plus que jamais, s'approprier ces prémisses de paix, et telle une fleur délicate, veiller jalousement sur sa croissance et son développement jusqu'à la conforter. C'est une ?uvre de longue haleine qui exige patience, confiance dans nos Institutions, soutien du Gouvernement dans sa mission de redressement du pays, intégrité, volonté totale de taire les rancoeurs, abandon des mots qui tuent ou construisent la haine, vigilance et rejet des hommes et femmes dont l'intérêt est de nuire, diviser, détruire
Le peuple devra refuser d'être un peuple-bétail, et s'impliquer dans ce nouveau programme de paix dont on espère qu'il sera le dernier.

3 ? Enfin le sommet :
Encore faut-il que le binôme Président de la République-Premier Ministre se conforme à l'Accord signé et le respecte dans son intégralité, dans un climat de Confiance. Ce climat de confiance, même s'il n'est pas entier, devra au moins sauver les apparences, afin de construire la réunification du pays et la cohésion nationale et favoriser le retour de la Fraternité.

Dix mois, c'est peu, très peu même pour éradiquer, corriger, promouvoir, lancer des chantiers, organiser les élections, etc. Et la fin des problèmes est encore lointaine. Faut-il, pour autant baisser les bras ? Ne dit-on pas que découragement n'est pas Ivoirien ? Chacun devra, à la place qui est la sienne, Président, Premier Ministre, Ministre, et Citoyen lambda, surpasser son ambition personnelle pour servir, servir, servir la Côte d'Ivoire dans ?'l'Union, la Discipline et le Travail .''


Auguste Miremont
Ancien Ministre de la Communication

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