jeudi 5 avril 2007 par Le Nouveau Réveil

L'information est quasi-officielle, le gouvernement du Premier ministre Guillaume Soro sera enfin rendu public demain vendredi 6 avril. Il s'agit d'une équipe de 33 membres dont la composition a suscité des empoignades à intensité variable entre le camp présidentiel et les Forces nouvelles, une véritable bataille d'intérêt et de stratégie à court et moyen terme entre les deux blocs. Pour ce premier round, il n'y a ni vainqueur ni vaincu, Gbagbo et Soro se séparent dos à dos.
Les tractations les plus sérieuses ont véritablement commencé le 29 mars dernier, lorsque Guillaume Soro désigné premier Ministre à Ouaga deux jours plus tôt était arrivé à Abidjan pour "récupérer" son décret de nomination avec le chef de l'Etat. Au cours du tête-à-tête que les deux acteurs principaux du dialogue direct ont eu au palais présidentiel, Laurent Gbagbo a tenté de convaincre Guillaume Soro d'accepter que la formation du nouveau gouvernement se fasse sur des bases nouvelles, un schéma de rupture avec Marcoussis. Le Chef de l'Etat voulait en effet que le nouveau Premier ministre et lui s'entendent pour élaborer un schéma gouvernemental, avec une clé de répartition qu'ils décideront d'un commun accord. Tout devrait donc être remis à zéro, et procéder comme si un nouveau président de la République élu arrivait avec ses propres règles et méthodes de gestion du pouvoir d'Etat. Mais dans le jeu du Laurent Gbagbo se dissimulait une stratégie mortelle et d'affaiblissement de l'opposition politique. Le PDCI et le RDR étaient principalement visés. Gbagbo ne voulait pas voir ces partis politiques dans le gouvernement. Pour lui, le camp présidentiel et les Forces nouvelles, les 2 signataires de l'accord de Ouaga devraient s'entendre pour repartir entre eux les portefeuilles.
Cette option a été catégoriquement rejetée par le nouveau premier ministre qui proposait, lui, le système du gouvernement Banny 1. C'est-à-dire une équipe dans laquelle le FPI et les Forces nouvelles sont en position de légers privilégiés mais où les partis politiques ont également leur place. Dans le gouvernement du 28 décembre 2005 de Charles Konan Banny, le FPI avait 7 ministères, les FN 6, le PDCI 5, le RDR 5, l'UDPCI 1, le PIT 1, le MFA 1 et l'UDCY 1. Cette proposition de Soro a été également contestée par Gbagbo. On est resté là jusqu'à lundi dernier où Désiré Tagro s'est rendu à Bouaké pour y rencontrer les Forces nouvelles avec dans son calepin de légers changements sur le mode de répartition des portefeuilles ministériels. 15 pour le camp présidentiel et 18 pour les Forces nouvelles. Cette autre proposition ne rencontre pas l'assentiment des Forces nouvelles parce que c'est dans leur quota qu'elles doivent puiser pour satisfaire le RHDP. Tagro Désiré et Konaté Sidiki sont donc envoyés à Ouaga pour solliciter l'arbitrage du facilitateur Blaise Compaoré. Après les différents exposés, le président du Faso tranche en faveur de Guillaume Soro. Puisqu'il trouve inapproprié que l'on écarte injustement les partis politiques d'un processus de sortie de crise qu'on demande à tous de s'approprier. Finalement l'option retenue est la suivante : le FPI aura 7 ministères, les Forces nouvelles 6, le PDCI et le RDR 5 chacun, le MFA, l'UDPCI, le PIT et l'UDCY 1 chacun. Mais le camp présidentiel et les Forces nouvelles conviennent de se partager les ministères de la Communication, de la Défense, de la Sécurité et de l'Administration du territoire. Chaque belligérant aura deux de ces 4 ministères. Selon des indiscrétions, la défense et la sécurité devraient tomber dans l'escarcelle du camp présidentiel. Pour des raisons évidentes de commodités et surtout pour ne pas gripper la chaîne du commandement militaire. Il serait en effet illusoire de confier la défense à Soro alors que Gbagbo reste le chef suprême des armées. Les ministères de la Communication et de l'Administration du territoire reviennent aux Forces nouvelles.
En ce qui concerne le département stratégique de l'Economie et des finances, les deux belligérants ont pu trouver un homme de consensus pour le diriger, il s'agit de M. Charles Diby Koffi, l'actuel ministre délégué à l'économie et aux finances. Il devient ministre plein. Par ailleurs, en rupture avec une vieille tradition qui veut que le droit soit reconnu au chef de l'Etat ou au premier ministre de se prononcer sur les hommes ou les femmes que chaque parti propose au gouvernement, Guillaume Soro a pu arracher à Gbagbo une concession de taille. Chaque parti désigne qui il veut pour occuper les postes qui lui reviennent. Donc si le PDCI a 5 postes, il ne peut proposer que 5 candidats. Justement en ce qui concerne ce parti, on est presque sûr que le président Bédié ne changera personne. La raison est toute simple, ces ministres sont en mission, ils n'ont pas commis de faute. Donc leur remplacement ne s'impose pas. Ils devraient même conserver leurs affectations initiales. A moins que le PDCI ne décide ne négocier pour obtenir un portefeuille plus important en remplacement d'un poste à lui initialement attribué. Au RDR également, le président Ouattara aurait décidé de jouer la carte du statu quo. Tout le monde reste. Laurent Gbagbo qui voulait, dans la perspective des élections prochaines, contrôler les ministères des NTIC, l'Enseignement supérieur, les Infrastructures économiques et l'Agriculture n'a finalement pas eu gain de cause. Les Ministères menacés sont ceux des Droits de l'homme, des transports, de la Bonne gouvernance, le secrétaire d'Etat à la protection civile.
Comme on peut le deviner, la mission de ce gouvernement sera hautement politique. Seront privilégiés les audiences foraines, l'identification, le désarmement et la réinsertion des ex-combattants. Avec la suppression de la zone de confiance, on ne parlera plus de redéploiement de l'administration mais de réaffectation des fonctionnaires à leurs postes.
Guillaume Soro souhaiterait aussi que les leaders de partis politiques ne rentrent pas dans ce gouvernement pour se consacrer pleinement à leur campagne.
Enfin la question de la résidence du nouveau Premier ministre demeure toujours une préoccupation. Où va loger Guillaume Soro ?
L'idée de l'ancienne résidence du Président Henri Konan Bédié a été explorée mais il s'est avéré que non seulement les frais de réhabilitation de cette résidence sont très élevés mais en plus cela ne prendrait pas moins de 6 mois. Finalement, il a été retenu que de façon transitoire, le premier ministre réside à l'Hôtel du Golf où il a établi ses quartiers depuis 3 ans. Les bureaux de la Primature n'étant pas aussi très sécurisés en raison de la proximité avec le palais présidentiel, la délocalisation serait aussi envisagée. Guillaume Soro pourrait garder ses bureaux non loin de l'ambassade des USA à la Riviéra Golf.
Akwaba Saint Clair

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