jeudi 5 avril 2007 par Le Temps

Messieurs les ministres, Monsieur le Secrétaire général du gouvernement, Monsieur le Secrétaire général de la primature, Monsieur le directeur de cabinet, Monsieur le chef de cabinet du premier ministre, Messieurs les ministres, Monsieur le secrétaire général de la présidence de la république chef de cabinet, Mesdames et Messieurs les conseillers, Messieurs les directeurs des structures sous tutelle de la primature, chers frères et chères s?urs, Mesdames et Messieurs les journalistes qui êtes venus en nombre que je n'ai jamais vu (rire dans la salle), et pourtant les cérémonies j'en ai fait. Mais cela est normal, car c'est un moment historique. Merci à tous d'être venus.
Monsieur le premier ministre, lorsqu'il y a de cela 15 mois, je recevais des mains du Premier ministre Seydou Diarra le témoin, j'ai dit deux choses. C'était dans cette même salle. D'abord au personnel de la primature qui avait accompagné Seydou Diarra dans sa mission, que ce jour-là ne devrait pas être considéré comme un jour de tristesse. Je voudrais dire la même chose aujourd'hui. Je leur ai dit que ce jour est d'autant moins un jour de tristesse, que le témoin était en train d'être passé des mains de quelqu'un que j'ai considéré comme un grand frère au sens vrai du terme et j'ai développé. Je ne veux pas refaire l'histoire. C'est pour cette raison que je souhaitais que ce moment soit considéré comme un moment de joie. Il se trouve que 15 mois après, je suis dans le rôle de Seydou Diarra et dans mon rôle de l'époque, se trouve Guillaume Soro. Alors je voudrais te dire, est-ce que ce que je viens de dire de Seydou Diarra à moi, peut être appliqué à Guillaume Soro et moi ! C'est à l'époque, un cadet qui prenait le relais. C'était l'ami qui recueillait l'héritage d'un autre ami. Au bout de 15 mois, me voici parvenu à une autre étape de notre longue marche vers la paix. Tout au long de ce parcours semé d'embûches, je me suis forcé d'ajouter ma part personnelle à l'héritage que m'a légué Seydou Diarra. C'est donc un patrimoine que j'espère augmenté, enrichi que je souhaite transmettre, à mon tour, au Premier ministre Kigbafori Guillaume, mon cadet que je considère comme un jeune frère, et un peu comme un fils. Si j'avais été précoce, je le dis mon fils aurait eu son âge. Mais je suis sérieux (rire de l'assistance)
Monsieur le Premier ministre, Mesdames et Messieurs, au moment de quitter mes fonctions, je voudrais, avec votre permission, en toute modestie et humilité, jeter un regard, un petit regard, rétrospectif sur le chemin que nous avons parcouru ensemble. En prenant le service de la Côte d'Ivoire, je n'étais pas en terre inconnue. En effet, de Dakar où je prenais mes fonctions de gouverneur de l'Afrique de l'ouest, j'avais pu me rendre compte que la crise que traversait notre pays, ne connaissait pas de répit, parce que la confiance entre les différents protagonistes faisaient cruellement défaut. J'avais pu me rendre compte que la défiance était partout la règle et qu'il était extrêmement difficile d'accorder les partis dans une telle ambiance. J'avais observé, au surplus, que la méfiance ancrée au sommet de l'Etat, gagnait la masse de nos concitoyens, et menaçait de saper les bases de l'unité nationale. Le diagnostique ainsi posé, il ne me restait plus, en prenant la tête du gouvernement de transition, de trouver le remède approprié à la maladie et à rechercher les moyens de son administration judicieuse. Puisque la détérioration de la situation résultait d'un manque de confiance, j'ai placé la restauration de la confiance au premier rang de mon action. J'étais, en effet, convaincu que si nous ramenions la confiance d'abord en chaque ivoirien, et les ivoiriens à chacun de leurs frères, les ivoiriens seraient en mesure de sauver leur pays meurtris par 5 années d'affrontement. 5 longues années de misère de souffrance et de misère. Mais nous disons tous que la confiance ne se décrète pas, elle se construit. C'est pourquoi, j'ai entrepris de la semer patiemment dans le terreau ivoirien, en veillant scrupuleusement à l'entretenir par des souhaits quotidiens. Des actions plus visibles l'ont matérialisé. Je pense notamment aux différentes rencontres entre les principaux acteurs de la scène politique de notre pays. Mais beaucoup d'autres actions bien plus décisives, me semble-t-il, ont été menées dans la discrétion, ont été indispensables à leur succès. Le résultat de tous ces efforts est là sous nos yeux. Car le dialogue, fils de la confiance est devenu, chez nous, une vertu. Mieux, le dialogue direct entre chef suprême des armées de Côte d'Ivoire, chef d'Etat et le Premier ministre, chef des armées des forces nouvelles, est le fruit le plus mûre de la doctrine que nous n'avons cessé de professer. Le dialogue et la confiance sont les deux piliers sur lesquels doit reposer la Paix. Chacun peut noter que désormais l'espoir est revenu au sein de la population, que les élans de fraternité et de solidarité ont refait leur apparition depuis quelques temps. Se sentant davantage en sécurité, les populations mènent leurs activités avec moins de crainte. La zone de confiance n'est plus que frontière virtuelle. Je le souhaite en tous cas. Et que les mouvements de population entre le nord et le sud, d'est en ouest, en passant par le centre de notre pays soient possibles. Ces embellies n'ont été possibles que parce que guidées par la paix. Je pense qu'avec la confiance et le dialogue dans la sincérité, nous pouvons être persuadés que la paix s'installera durablement dans notre pays. Il importe de ne plus perdre de vue que la paix véritable n'est pas un vain mot qu'on répète à souhait. Elle ne va sans justice, sans respect de l'autre, sans respect des droits humains. Elle s'accommode mal des comportements bellicistes ou belliqueux. Elle s'accommode mal des comportements haineux et des violences de toutes natures. Je voudrais à présent m'acquitter de ma dette envers le peuple de Côte d'ivoire en adressant mes pensées les plus affectueuses, mais surtout et surtout mes remerciements les plus sincères, pour m'avoir constamment apporté son soutien. Je vous sais gré d'avoir empêché la reddition de notre pays grâce à sa grande capacité d'auto dérision, grâce à son humour. Même au milieu des plus grands périls les ivoiriens ont été sauvés du désespoir par leur sens de l'humour. Un peuple qui a de l'humour ne meurt jamais.
Qu'il me soit également permis d'exprimer toute ma gratitude à la communauté internationale pour son appui constant à la Côte d'ivoire et pour la sollicitude dont elle n'a cessé de m'entourer. Permettez- moi notamment de féliciter spécialement tous les chefs d'Etat de la CEDEAO et de l'Union africaine. Je ne saurais oublier le chef d'Etat de la Côte d'ivoire à qui je dis toute ma reconnaissance. D'abord pour m'avoir permis de faire cette expérience mais aussi pour toutes ces actions fructueuses que nous avons menées ensemble. Je le dis souvent ces derniers temps qu'il est bon d'être ensemble. Je voulais donc également lui manifester ma reconnaissance. J'étends ces remerciements à tous les responsables politiques, administratifs, et militaires. J'étends ces remerciements à tous les hommes de presse, même si certains, inutilement ne m'ont pas facilité la tâche. Je voudrais donc remercier tous ceux qui m'ont accompagné aussi bien positivement que négativement.
Monsieur le premier ministre, Monsieur le Secrétaire général du gouvernement, Mesdames et Messieurs, l'artisan a beau s'acharner à l'ouvrage, ce n'est qu'un être humain. Et aucune ?uvre humaine ne saurait être parfaite. C'est donc à mon regret que j'observe que je n'ai pu aboutir à l'organisation des élections comme promis à nos concitoyens. Comment du reste la Côte aurait-elle pu engager des consultations nationales quand le ciment de la confiance n'était pas encore consolidé. Nous savons tous que la résolution définitive de la crise ivoirienne sera une ?uvre de longue haleine dont les élections constituent le point d'or. La confiance est revenue. Mais l'environnement propice à l'organisation des élections que les ivoiriens appellent de tout leur v?u semble ainsi créée. Monsieur le premier ministre et cher frère Guillaume Soro, vous voici averti de la lourde tâche à poursuivre et de mener à bon terme la mission que nous avons entamé ensemble. Vous êtes au même titre que le chef d'Etat, un des acteurs, un des protagonistes , je n'aime pas beaucoup ce terme, de la crise que traverse le pays depuis le 19 septembre 2002. Par conséquent, vous connaissez les axes essentiels du programme de sortie de crise. Ce n'est donc pas à vous, Guillaume Soro, que j'apprendrais que le gouvernement doit identifier les populations vivant sur notre sol, surtout que le droit d'avoir un titre d'identité me semble être un droit inaliénable. Il vous faudra aussi procéder au désarmement, au démantèlement des milices. Dans ce chapitre, votre compétence s'invite, car comme je le disais, vous êtes chef suprême des forces armées des forces nouvelles. Il faut aussi assurer la réinsertion des ex-combattants. Il faudra en outre assurer dans les zones qui en sont actuellement dépourvues, le retour total, effectif et définitif de l'administration, de toute l'administration. L'identification, le désarmement, la réinsertion, démantèlement des milices et le redéploiement de l'administration. Si ces opérations sont menées à leur terme alors le reste sera facile à mettre en ?uvre. Lorsque la menace des armes des bandes armées aura disparu et que l'administration se sera déployée, le champ sera alors libre pour l'organisation d' élections ouvertes, libres et transparentes. Vous n'ignorez pas les délais prévus par l'accord de Ouagadougou à condition que toutes les populations aient été identifiées. Et vous n'ignorez pas que chacun de ces accords, le gouvernement auquel vous avez appartenu et dans lequel vous étiez le numéro deux a largement fait avancer les choses.
Monsieur le Premier ministre, je ne vous rappelle rien. Je vous rappelle ces missions que pour mémoire, car vous en connaissez, aussi bien que moi, les contraintes. Votre tâche consistera à conduire de front l'action gouvernementale ordinaire et le programme de sortie de crise. Mais connaissant vos qualités, je ne doute pas que vous saurez trouver les démarches indispensables, pour le succès de votre mission. Pour ma part, je vous adresse tous mes encouragements, mon soutien et celui de tous les ivoiriens.
Monsieur le Premier ministre, le plus beau présent que vous puissiez offrir à vos compatriotes est de leur apporter la paix. Une Paix définitive et durable. Soyez certains que dans l'accomplissement de la rude tâche qui vous attend, tous mes v?ux de succès vous accompagne. Outre la paix, vous avez aussi la lourde tâche de ramener notre pays dans le giron de la démocratie et du progrès. Pour ce faire, il vous faudra faire en sorte que le comportement citoyen de la tradition républicaine inspire toutes les actions civiques. En ce qui me concerne, je poursuivrais mon combat pour la paix et le développement de notre pays en tout temps et en tout lieu. Ce combat n'a pas de fin. C'est une action au long cours, qui ne requiert que de la volonté. Plein succès à votre entreprise et que la Côte d'ivoire sorte enfin de la tragédie qui l'étrangle.
Vive la Côte d'ivoire unie, paisible, fraternelle et indivisible.
Je veux m'adresser à la Côte d'ivoire. Je veux lui dire ceci : Que la Paix soit dans tes murs. la tranquillité dans tes palais. A cause de mes frères, je me dis paix pour toi Côte d'ivoire. A cause de la maison du Seigneur notre Dieu, je veux demander pour toi, le bonheur.

Je vous remercie
Retranscris par Jean David C.

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