vendredi 6 avril 2007 par Notre Voie

Nous apprenons avec tristesse et grande émotion la mort de Gnazalé Djédjé Jean, un militant acharné du FPI, peut-être le plus acharné d'entre nous. Tout ce qu'on pourra dire maintenant à son sujet ne suffira pas à combler le vide qu'il laisse.
Pour ma part, l'ayant côtoyé quelque peu, je voudrais, en peu de mots lui rendre ce témoignage. Qu'il m'excuse de parler de lui sans qu'il ait donné l'autorisation.
Gnazalé Djédjé Jean, tout jeune diplômé va à l'université, pour, dit-il, s'y inscrire comme enseignant. Là-bas, on lui dit qu'il n'y a plus de place pour la matière qu'il veut enseigner. Il est sociologique de formation. Tout débité et en rogne, il vient au ministère de l'Education. Il veut rencontrer le ministre. Celui-ci le reçoit et sa démarche reste vaine. Il descend de la Tour de la Cité Administrative, trouve là des connaissances avec qui il entame une conversation parmi mille autres.
Sur des entrefaits, le ministre Balla Kéita, qui est descendu de son bureau, aperçoit Gnazalé en grandes discussions avec des gens. Un attroupement en quelque sort. Le ministre abandonne sa voiture officielle et vient tout droit vers Gnazalé qu'il apostrophe en ces termes :
"Gnazalé, tu es encore là. Quand on vous parle, vous ne voulez pas comprendre. Votre révolution avec Gbagbo et consorts là ne passera pas. On vous dit d'aller faire des études, vous allez faire sociologie. C'est quoi ça ? Ne venez pas nous embêter ici...". Gnazalé de répondre prestement et calmement au ministre qui est, tout surpris du ton non vindicatif.
"Non, Monsieur le ministre, il ne s'agit pas de cela. Vous avez dit ce que vous aviez à me dire. Quant aux études, j'ai fait ce qu'il m'a plu de faire. Et ça ne vous regarde plus".
Balla d'ajouter : "Ah bon ! Abihi ! A bientôt".
Voilà l'homme Gnazalé, tout entier, de qui nous allons à présent parler au passé. Un militant acharné, dérangeant. Il fut un moment un véritable cas dans notre formation politique : excessif, passionné, ne fuyant jamais la discussion, mais prêt à comprendre la position de son vis-à-vis même s'il ne la partage pas.
Que devons-nous dire maintenant de lui. Il s'en va sans crier gare, alors que ce sont les "spectateurs" d'hier, ceux qui disaient : "On est avec vous. Mais comme on a des enfants, on ne peut rien. On vous encourage seulement" ; ce sont ceux-là qui, aujourd'hui, sont à l'honneur. Lui le danseur du "Zagrobi" ou même le tapeur de tam-tam de "l'Aloukou", il part sous la pointe des pieds dans l'indifférence.
Les grandes douleurs sont muettes, dit-on. Cette disparition nous donne une fois de plus la preuve que si elles le sont vraiment, y en a eu d'autres qui révoltent tout simplement.
Je l'ai dit, Gnazalé est sans doute l'un des oubliés de notre Refondation, encore qu'il n'en demandait pas tant. Ce qui est sûr, c'est qu'il manquera à l'appel, quand sonnera l'heure de la nouvelle reconquête.


(1) En bété, Abihi : camarade






Jacques Préjean

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