vendredi 6 avril 2007 par Nord-Sud

Le nouveau Premier ministre, dès la constitution de son gouvernement, est pris en otage par les clans politiques qui se battent pour lu imposer leurs vues et leurs hommes.

Guillaume Soro va-t-il vraiment faire du neuf avec du vieux ? Va-t-il former son gouvernement avec de vieux chevaux de retour ? Selon des informations concordantes qui nous parviennent de la Primature, le nouveau Premier ministre, prisonnier des exigences de ses alliés politiques, a dû jeter à la poubelle son projet initial de constituer un gouvernement de technocrates, un gouvernement de mission. Son option première de bâtir un gouvernement rajeuni, rafraîchi et technocratique a fait place à la solution du réalisme. Celle qui a consisté pour lui à reprendre presque, poste après poste, le gouvernement n°1 mis en place par Charles Konan Banny. Ainsi, après les dernières discussions avec le chef de l'Etat, il semble que l'équipe définitive comprendra 32 ministres. Tous les partis politiques signataires de Marcoussis y seront représentés selon un quota précis. Le RDR et le PDCI-RDA conserveront les 5 ministères qu'ils ont actuellement. Le PIT, l'UDPCI, le MFA et l'UDCY garderont leurs uniques ministères respectifs. Le FPI aura 7 postes et les FN, 6 dit-on. En plus de cela, de bonnes sources, l'on apprend que le Premier ministre a garanti aux partis politiques qu'ils garderaient les portefeuilles ministériels qui sont les leurs actuellement. Mieux, ils pourront garder tous leurs ministres, s'ils n'ont pas envie d'en changer. Voyant la poussée exercée par les partis politiques sur le nouveau chef du gouvernement, Laurent Gbagbo s'est mis de la partie. Les départements ministériels qui étaient l'apanage exclusif du Premier ministre, ont été sortis de sa gibecière pour être mis sur la table, en vue d'être renégociés. Charles Konan Banny avait la mainmise sur les ministères de la Communication, de l'Economie et des Finances, de la Sécurité, de la Défense, de l'Administration du Territoire. L'on apprend que dorénavant Gbagbo aura sous son contrôle, les ministères de la Défense, de la Sécurité. Le département de l'Economie et des Finances, dit-on, sera occupé par Charles Diby, ex-directeur général du Trésor nommé par Gbagbo. Soro aura la Communication et, a priori, l'Administration du Territoire. Mais même à ce niveau, rien n'est encore joué. Car Gbagbo est revenu sur bien des points de l'accord complémentaire conclu à Ouaga. Vu qu'il a signé une importante délégation de pouvoirs au nouveau Premier ministre, en retour, le chef de l'Etat ?uvre à le dépouiller au maximum des moyens d'action qui pourraient en faire un rival trop puissant. Il pinaille sur tout et pour tout, même sur les postes de Directeurs d'administration centrale ou de directeurs d'entreprises parapubliques. Il bataille pied à pied pour lâcher le moins possible, voire pour recouvrer l'entièreté de ses pouvoirs. Il ferraille pour réduire en cendres la logique marcoussiste qui oblige le président de la République à s'entendre d'abord avec le Premier ministre avant de faire quoi que ce soit. Soro est donc entre le marteau de l'expansionniste ministériel de Gbagbo et l'enclume des pressions de ses alliés. Le Premier ministre, qui man?uvre pour ne pas se couper de ses partenaires du G7, accède à leurs exigences. Il sait que ses alliés n'ont pas accepté son accession à la Primature et ne le soutiennent que du bout des lèvres. Il est conscient que même s'ils ne sont pas nocifs sur le terrain des actions de mobilisation, ils ont une capacité de nuisance qui peut être préjudiciable au processus de sortie de crise. Il veut donc éviter de multiplier les arme contraires?. Face à un Gbagbo dont il sait pertinemment qu'il doit se méfier à tout instant, il ne veut pas avoir également à surveiller ses arrières quand il est dans sa famille? du G7. La résolution de ces équations politiciennes le met dans une position inconfortable. Il est obligé de gouverner sans imprimer son propre style et sa propre vision à son gouvernement. Comment peut-il dans ces conditions être efficace ? Quelle loyauté peut-on attendre d'un gouvernement dont on n'a choisi ni la taille, ni les membres, ni leurs affectations ? Comment conduire à bien le processus de sortie de crise quand l'équipe dont on a sanctionné les résultats est intégralement reconduite ? Comment Soro pense-t-il réussir à faire du neuf avec du vieux ? Soro peut-il réussir à gouverner avec une équipe constituée par d'autres que lui et qui a sa loyauté orientée envers ceux qui les ont fait princes ? Un gouvernement dont la plupart des ministres ont usé leur temps à puiser dans la cagnotte public et dont on veut chasser les membres les plus méritants ? En vérité, la mise en place poussive du gouvernement à venir et la reconduction quasi-intégrale annoncée des membres de l'équipe sortante fait naître de sérieux doutes sur son efficacité. Voire sur son intégrité.

Touré Moussa

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