lundi 9 avril 2007 par AP

NEW YORK (AP) - Un ancien ministre irakien, Ali Allaoui, décrit, dans un livre récemment paru aux Etats-Unis et intitulé "L'Occupation de l'Irak", la faillite américaine dans ce pays. Résultat, les Irakiens ont "tourné le dos à ceux qui auraient pu être leurs libérateurs", écrit-il.

Cet ancien diplômé de l'Université britannique d'Oxford s'est vu confier plusieurs fois, depuis 2003, les portefeuilles du commerce, de la défense et des finances en Irak.

Ali Allaoui narre par le menu la longue liste des faillites qui ont conduit à la situation actuelle, n'épargnant ni les Américains, ni les Irakiens. Le mot "ignorance" revient souvent dans son récit. Il brocarde en premier lieu la "monumentale ignorance" de ceux qui, à Washington en 2002, ont poussé à la guerre sans avoir "la plus petite idée" des réalités en Irak. "Les gens plus perspicaces savaient que l'invasion de l'Irak ouvrirait les failles de la société américaine."

Après l'invasion, poursuit Ali Allaoui, l'Autorité provisoire de la coalition, sous la houlette de Paul Bremer, s'est signalée par son "amateurisme flagrant et son arrogance affichée". Les Américains, explique-t-il, ont commis une première et grande erreur en décidant sans concertation la dissolution de l'armée irakienne, qui aurait pu selon lui contribuer à réprimer l'insurrection émergente. Au lieu de quoi des dizaines de milliers d'hommes démobilisés, frustrés, allèrent grossir les rangs de l'insurrection. La purge de milliers de membres du Parti Baas de Saddam Hussein, constate-t-il par ailleurs, a abouti à se priver, à un moment crucial, de cadres compétents à la tête des différentes administrations et rouages de l'Etat. Dans ses mémoires parues en 2006, Paul Bremer relate qu'une partie de la hiérarchie militaire en Irak réclamait, en 2003, la réintégration d'éléments de l'ancienne armée irakienne -ce que l'administration Bush a refusé. M. Bremer, plus généralement, s'est plaint de l'interventionnisme de Washington.

Parmi les multiples erreurs commises, Ali Allaoui cite la paralysie des opérations financières de nombreuses entreprises d'Etat, en raison d'un mauvais ordre d'affectation des comptes bancaires ; l'accent mis par l'Autorité provisoire de la coalition sur l'entreprise privée, qui a permis à des "gangs commerciaux" de monopoliser à leur profit les différentes opérations commerciales ; un libéralisme effréné débouchant sur le pillage des ressources irakiennes, les ressources pétrolières mal gérées, bradées, la corruption généralisée. "L'Etat à bout de souffle et corrompu de Saddam Hussein a été remplacé par un nouvel ordre à bout de souffle, inefficace, incompétent et corrompu", explique l'auteur, qui fut aux premières loges.

Cousin de l'ancien Premier ministre irakien Iyad Allaoui, Ali Allaoui est chiite mais son ouvrage ne traduit aucun parti-pris. Il a voulu montrer comment les mêmes et "insipides" déclarations américaines sur le succès de l'intervention en Irak dissimulaient "l'énorme trou noir" de la réalité, l'échec de la reconstruction du pays. Aujourd'hui, conclut Ali Allaoui, "les seuls alliés de l'Amérique en Irak sont ceux qui ont cherché à manipuler la grande puissance à leur petit profit. Il aurait pu en être autrement".

Associated Press

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