mardi 10 avril 2007 par Nord-Sud

Le nouveau Premier ministre subit les premiers feux de la critique. Il est accusé d'avoir reculé devant le chef de l'Etat en lâchant la Défense, l'Intérieur et les Finances. Son entourage révèle pourtant que Guillaume Soro a une botte secrète. A la découverte des armes du nouveau maître de la primature.

La critique est féroce. Une partie de l'opinion nationale considère que le nouveau Premier ministre a battu en retraite face au Woody de Mama, concédant ainsi des ministères de souveraineté au camp présidentiel. Laurent Gbagbo, s'est arrogé dans le nouveau gouvernement les ministères de la Défense, de l'intérieur (qui inclut la Sécurité et l'Administration du territoire.) et le département de l'Economie et des Finances. Dans le gouvernement précédent, la résolution 1721 des Nations Unies avait fait tomber ces ministères dans le giron du Premier ministre Charles Konan Banny. Pour les critiques, le gouvernement issu du dialogue direct est un recul par rapport à la 1721 qui avait concentré la Défense, la Sécurité et les Ressources financières dans les mains du chef de gouvernement. Toutes ces précautions visaient à éroder la mainmise du chef de l'Etat sur le processus de paix. Mais, elles n'ont pas empêché l'échec de la transition conduite par Charles Konan Banny qui, bien qu'ayant en théorie de rééls pouvoirs, n'a jamais pu prendre des actes de gouvernance pour mettre en pratique sa feuille de route. Selon des indiscrétions, le Premier ministre Guillaume Soro a cédé sur ces ministères parce qu'il avait en main, au sortir de Ouagadougou, des cartes importantes, bien plus solides, qui faisaient de lui l'alpha et l'oméga du processus de paix stricto sensu. Sur la Défense, la Sécurité et l'Administration territoriale, l'identification et les élections, il a arraché au camp présidentiel de l'autorité et obtenu de son chef une réelle emprise sur la nouvelle transition.

La Défense et l'Intérieur (Sécurité). Les ex-rebelles estiment que ces deux questions, outre les finances, font partie des prérogatives du chef de l'Etat. Dans la dynamique de l'accord de paix de Ouagadougou, les FN ont concédé à Laurent Gbagbo ces départements. Les Forces nouvelles ont un territoire et une armée sous l'autorité de Guillaume Soro. Elles n'entendent pas disputer dans la partie gouvernementale des pouvoirs dévolus au chef suprême des armées. Après la signature de l'accord de Ouagadougou ayant opéré un partage intelligent du pouvoir, il était inconvenable, soutient une source proche des FN, de venir administrer dans la partie (Sud) gouvernementale les questions de défense et de sécurité. Il était tout à fait judicieux de donner à Gbagbo des gages de bonne foi, lui offrir une réelle garantie sur la survie de son pouvoir. En cas d'atteinte à la sûreté de l'Etat, Le Premier ministre et les Forces nouvelles seraient automatiquement pointés du doigt , lâche un autre cadre. Il précise que la sécurisation du territoire par Gbagbo tombe sous le sens pratique. En sa qualité de chef suprême des armées de Côte d'Ivoire, ces deux postes ministériels lui revenaient de droit d'autant plus que l'accord de Ouagadougou, en plus d'être son propre référent, a visé clairement la Constitution. Ce que Soro a donné de la main droite, il le récupère de la gauche, notamment en ce qui concerne la sécurisation du processus de paix. Conformément à l'accord de Ouagadougou et à la délégation des pouvoirs qu'il détient du chef de l'Etat, le Centre de commandement intégré est le cadre où s'exercera l'autorité (militaire) du Premier ministre. Le Cci chargé de la refonte de l'armée est rattaché directement à la primature. L'accord de Ouaga donne carte blanche au chef de gouvernement pour restructurer l'armée et conduire le processus du Ddr. Autrement dit, ce pan échappe à Laurent Gbagbo, qui exercera sur la partie Sud du pays les fonctions régaliennes de l'Etat.
L'histoire du gouvernement Banny renforce le choix de cette cohabitation, de ce partage du pouvoir exécutif assez original. En effet, durant plus d'un an d'exercice, l'ancien ministre de la Défense, Aphing Kouassi, sorti de la manche de Charles Konan Banny n'a jamais pu affirmer son autorité. Le bataillon blindé, le bataillon des commandos parachutistes, la garde républicaine étaient sous l'autorité du chef de l'Etat. Il a été débordé de toutes parts par les commandements parallèles institués depuis le palais pour l'affaiblir et éviter qu'il prenne du pouvoir. Le même schéma de partage a été recopié sur le dossier de l'administration territoriale.

L'Administration territoriale. Elle fait aussi partie des prérogatives du chef de l'Etat, partant du ministre de l'intérieur, Désiré Tagro. Ce dernier est chargé de gérer les mouvements et services préfectoraux. Ses charges ne vont pas plus loin. Le nouveau Premier ministre, bien qu'il supervise les tâches du ministre de l'Intérieur, aura exclusivement la charge de conduire à son terme le programme de redéploiement de l'administration, l'Identification et tout le processus électoral. Ces points importants de la feuille de route de Guillaume Soro sont directement rattachés à la primature. Les structures chargées de les conduire dont le Programme national de redéploiement de l'administration (PNRA), le Comité national d'identification dépendent également du Premier ministre. Reste à espérer que le chef de l'Etat, un as des pirouettes politiciennes, ne revienne mettre en cause ce partage et chasser sur les terres de Guillaume Soro.

Assoumane Bamba

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