mercredi 11 avril 2007 par Le Nouveau Réveil

Quelques cinq jours après la publication du gouvernement dit de mission, les commentaires et autres appréciations vont bon train.
Aspirant à la paix, on se doit, honnêteté oblige, de saluer ce gouvernement sensé ramener définitivement la paix. Cet objectif à lui seul devrait faire taire tous les autres commentaires et analyses. Mais, à la vérité, des erreurs ont été commises dont les conséquences pourraient éloigner tout le monde des objectifs. Il faut surtout les reconnaître maintenant, les assumer, en vue de les corriger le plus rapidement possible. Dès l'annonce de la nomenclature du gouvernement, plus d'un Ivoirien s'est surpris à se demander si vraiment Soro Kigbafori Guillaume, le leader des Forces nouvelles qui demandait encore en octobre 2006 (à la veille de la réunion de la CEDEAO), la mise à l'écart de Gbagbo et la suspension de la constitution, a accepté et signé. Et bien oui. Au nom de la paix. Il a fait des concessions, des grandes et des moins grandes. Les grandes concessions ont consisté à reconnaître (enfin) sans le crier, la légitimité de Gbagbo. Les petites concessions consistent à laisser à Gbagbo toutes les attributions de la légitimité. C'est dans cet ordre que peut être classé le fait qu'il ait cédé à Gbagbo tous les ministères de souveraineté et surtout l'appareil électoral. Ceci, pour beaucoup d'observateurs est une grave erreur. A moins qu'au nom de la paix, Soro ne veuille plus de la démocratie. Certes, Gbagbo n'est plus son ennemi. Peut-être même que le régime FPI n'est plus l'adversaire des Forces nouvelles, mais sont-ce là de raisons suffisantes pour mettre dans la main de celui qui ne veut aucune opposition, aucune alternance, toutes les armes de la confiscation du pouvoir ? Le FPI étant au début et à la fin de l'appareil électoral à travers les ministères de l'Intérieur, de la Défense, de la Sécurité, du Plan, qu'attendre donc des opérations électorales si ce n'est le maintien de Gbagbo ? On a encore en tête le slogan "on gagne ou on gagne" des "patriotes" de Gbagbo ou encore la déclaration de Blé Goudé " Si Gbagbo perd les élections ", je crée ma rébellion. Soro pense véritablement qu'au nom de la paix qui est en train de soulever des montagnes, Gbagbo acceptera de contrôler, d'organiser des élections pour les perdre ? A-t-on perdu de vue que l'objectif de tout le combat et de la résistance de Gbagbo n'est que son maintien au pouvoir. Quel qu'en soit le prix à payer ?
Visiblement Soro a commis ses premières erreurs. Sans doute de bonne foi. Mais elles ne seront pas sans effet sur la suite de processus. Et ce ne sera pas la faute à quelqu'un d'autre. Encore moins du RHDP qui n'a fait que maintenir ses ministres sans influencer le partage des ministères de souveraineté entre Soro et Gbagbo. Supposons un seul instant que Bédié et Ouattara aient accepté qu'on change leurs ministres ou qu'on diminue le membre de leurs portefeuilles, en quoi cela aurait-il pu contraindre Gbagbo à laisser tomber les ministères clé ? Par ailleurs quel poids auraient les Forces nouvelles de qui Gbagbo aura réussi à éloigner la Force politique (RHDP) dans un territoire qu'elles ne contrôlent pas ? Le RHDP s'est agrippé à ses ministères techniques pour ne pas donner l'occasion à Gbagbo de faire de la diversion dans ses rangs. N'étant pas candidat, pourquoi Soro ne s'est-il pas donné un couloir de regard sur le processus ne serait-ce qu'en gardant sous son contrôle un des ministères intervenant directement dans la préparation des élections ? On parle de l'intransigeance du RHDP qui l'aurait gêné. Cette intransigeance qui peut s'expliquer par la voracité surtout les pièges à couvert du camp présidentiel doit être vu aujourd'hui comme un garde-fou. Elle est loin de menacer le processus. Elle établit un équilibre minimal et menace la compromission. Le RHDP, déterminé à aller à la paix, a donné sa caution et sa bénédiction au dialogue direct et à son application efficiente. Si dans cette application, une partie des signataires veut gruger l'autre, il convient de prévenir. La partie qui a commis l'erreur préjudiciable devra aussi l'assumer dans l'optique de la rattraper. Pour ne pas que l'accord de l'espoir devienne l'accord de dupes. La formation de l'actuel gouvernement a remis en place toutes les dents du clan Gbagbo. Et le Premier ministre ne saurait être surpris quand le régime commencera à mordre tout le monde.
Eddy Péhé

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