mercredi 11 avril 2007 par Notre Voie

Après la signature de Ouagadougou et la formation du nouveau gouvernement, le député Sokouri Bohui, secrétaire national chargé des Elections au FPI, parle aux militants de son parti et à l'ensemble des Ivoiriens.

Notre Voie : Monsieur le député, quel est le regard que vous jetez sur l'accord de Ouagadougou en votre qualité de secrétaire national chargé des Elections au FPI ?
Député Sokouri Bohui : Avant d'en arriver à votre question, je voudrais d'abord me réjouir de la formation du nouveau gouvernement dans les délais prescrits par l'accord de Ouaga. En tant que militant du FPI, parti au pouvoir, j'étais en droit d'attendre mieux que ça en terme de nombre de portefeuilles. Mais que signifie aujourd'hui un, deux ou trois portefeuilles en plus face à l'enjeu national, la recherche de la paix ? C'est pourquoi je suis heureux de ce que c'est une équipe qui rassemble l'ensemble des acteurs politiques et de la société civile, et qui, de ce fait, a tous les atouts pour conduire le pays à la paix et à des élections justes et transparentes.
Revenant à votre question, je voudrais souligner que je suis heureux et fier de cet accord pour quatre raisons.
La première est que cet accord suscite beaucoup d'espoir quant à l'avènement de la paix. Cela fait bientôt 5 ans que nous recherchons la paix. Beaucoup d'accords ont été signés, mais la paix n'est pas venue. Avec cet accord, tout le monde est unanime pour dire que la paix n'est plus loin. Jamais un accord n'a suscité autant d'espoir chez les Ivoiriens pour la paix.
La deuxième raison est que cet accord a été conclu entre Ivoiriens. Cela donne une fois de plus raison au président Gbagbo qui n'a de cesse de dire que les Africains sont capables de régler leurs propres problèmes sans l'apport de la communauté internationale. C'est ce qui vient de se passer à Ouagadougou. Nos frères qui ont pris les armes ont accepté la main tendue du président Gbagbo sans intermédiaire. Le président burkinabé Blaise Compaoré n'était que facilitateur. Mais, là encore, c'est un Africain.
La troisième raison est que cet accord est une victoire du peuple sur les ennemis de la démocratie et de la paix.
La quatrième raison tout aussi importante que les trois précédentes, c'est que l'accord de Ouagadougou constitue une éclatante victoire diplomatique du président Gbagbo. Je ne vous apprends rien en disant que l'adoption de la résolution 1721 de l'Onu a fait l'objet d'un âpre combat diplomatique. L'on avait voulu suspendre notre Constitution. Mais la diplomatie déployée par le président de la République a eu raison de nos ennemis. 4 pays sur 5 que compte le Conseil de Sécurité de l'Onu ont dit non au projet diabolique de la France chiraquienne. C'est donc à la suite de cette résolution, qui, malgré tout, violait à certains endroits la Constitution, que le président Gbagbo a proposé le dialogue direct qui, aujourd'hui, est porteur d'espoir. Le FPI ne peut donc qu'en être fier, et moi avec lui. Car, au regard de tous les efforts diplomatiques qu'il a déployés pour arriver à l'accord de paix de Ouaga, le président Gbagbo vient de prouver, aux yeux du monde, qu'il est un grand résistant, un président de la trempe de Nelson Mandela, de tous les chefs d'Etat qui font de la recherche de la paix le credo de leur vie politique.

N.V :Y a t-il des avancées quant aux points relatifs au processus électoral ?
M.S.B : L'accord de Ouaga note trois phases principales dans le processus électoral: les audiences foraines, l'identification et l'établissement et la distribution des titres (carte nationale d'identité et carte d'électeur). Avant l'accord de Ouaga, il y avait des divergences entre le camp présidentiel et l'opposition. Mais l'accord a permis de régler la quasi-totalité de ces divergences.
S'agissant des audiences foraines, il ne sera plus délivré de certificat de nationalité in situ. Car un juge, aussi compétent et honnête soit-il, peut se tromper de bonne foi. L'autre satisfaction et non des moindres sur ce point, c'est que, désormais, toutes les populations doivent se présenter devant les juridictions de leur lieu de naissance. Ce point est important, car les personnes qui sont nées dans la même localité se connaissent plus ou moins, surtout dans les campagnes. On pourra alors dénoncer les fraudeurs.
S'agissant de l'enrôlement et des inscriptions sur les listes électorales, vous n'êtes pas sans savoir que le point qui opposait nos deux camps portait sur l'opérateur qui allait inscrire les populations sur les listes électorales. Pour nous, ce travail devait être confié exclusivement à l'Institut national de la statistique (INS), comme cela a toujours été le cas depuis l'indépendance. Mais surtout parce que l'INS est outillé pour le faire. Il a non seulement le matériel, mais il a surtout l'expertise nécessaire et les compétences requises. Les autres voulaient qu'on écarte l'INS au profit d'un autre opérateur extérieur. L'accord de Ouaga a coupé la poire en deux sur ce point. L'inscription sur les listes électorales va se faire par l'INS conformément à l'accord de Pretoria, aidé en cela par un autre opérateur qui sera choisi en accord avec les deux camps. Nous n'y voyons aucun inconvénient.
L'autre point de satisfaction, c'est quand l'accord dit que les parties privilégient l'identification électorale?. Ça veut dire qu'il ne s'agira plus de faire l'identification générale de la population, mais d'identifier les électeurs.
Cependant, nous avons quelques réserves, c'est quand l'accord de Ouaga dit que les Ivoiriens en âge de voter devront se faire inscrire sur les listes électorales seulement avec un acte de naissance et un jugement supplétif d'acte de naissance tenant lieu?. Le problème, c'est comment prouver qu'on est Ivoirien avec ces deux pièces ? En tout état de cause, nous allons donner des mots d'ordre précis à nos militants afin qu'ils s'organisent pour déceler les fraudeurs et les dénoncer.

N.V. : Est-ce à dire que vous n'avez plus inquiétude ?
M.S.B : Ah si, nous en avons encore, mais nous pensons qu'avec un peu de volonté de part et d'autre, on peut trouver des solutions idoines. Il y a, par exemple, le cas de la CEI. Un problème important sur lequel l'accord est muet, notamment sur la composition du bureau des cei régionales. La composition actuelle fait la part trop belle à l'opposition. Or nous devons aller aux élections dans la tranquillité et la transparence. C'est le v?u de tous. Il va sans dire que tous les acteurs doivent être rassurés par la structure qui organise les élections. De toute évidence, en la matière, la CEI actuelle n'est pas rassurante. C'est pour cette raison que le FPI souhaite, avec le nouvel esprit, qu'un accord soit trouvé pour que, dans les bureaux des commissions régionales, départementales et sous-préfectorales, il y ait l'équilibre pour rassurer tout le monde. Je lance donc un appel au président de la CEI et à toutes les parties prenantes pour qu'on se retrouve rapidement, afin d'évacuer ce problème ; question de rester dans le ton de la nouvelle confiance. Car il faut que les élections à venir ne soient plus source de conflit. Mais qu'elles nous permettent de rétablir et de construire la paix durable et même définitive pour notre pays.
Par ailleurs, nous entendons souvent avec amusement les gens parler, notamment sur les chaînes des radios étrangères, de l'inscription de trois millions de nouveaux électeurs sur les listes électorales. Ce sont des chiffres farfelus. On se demande d'ailleurs comment ceux qui le disent ont pu identifier ces personnes-là. Parce qu'en Côte d'Ivoire, il ne peut pas y avoir trois millions d'Ivoiriens sans papier. Ce n'est pas possible. Ceux qui disent ces choses non fondées veulent changer le corps électoral en y inscrivant massivement des étrangers à qui on aura distribué frauduleusement des jugements supplétifs. Nous ne pouvons accepter cela. Nous pensons que les Ivoiriens qui n'ont jamais eu de pièce ne peuvent pas excéder 200 mille personnes. Par exemple, dans mon village, après vérification, il n' y a qu'une seule personne qui n'a jamais eu de pièce. Il y a peut-être un peu plus dans certains villages, surtout dans le Nord. Mais si on prend l'ensemble des 11000 sites habités en Côte d'Ivoire, avec une moyenne de 10 Ivoiriens non déclarés à l'Etat civil dans chaque village, on aura alors 110000 personnes. Je parle bien des Ivoiriens et non des étrangers qui veulent frauder pour devenir Ivoiriens. On peut donc arrondir le chiffre à 200000 personnes. C'est pourquoi les audiences foraines constituent une opération extrêmement importante. C'est déjà à ce niveau que les Ivoiriens doivent combattre la fraude. D'où la vigilance dont doivent faire montre nos militants.
Ces remarques faites, on peut dire que, globalement, l'accord de Ouaga a permis de faire des avancées notables sur le processus électoral. Cet accord a résolu bien de problèmes.

N.V : Croyez-vous que cet accord conduira effectivement le pays à des élections dans le délai prescrit ?
M.S.B : Vous savez, l'obstacle physique à l'organisation des élections, c'est le fait que ceux qui ont pris les armes les détiennent encore. Mais si le chronogramme arrêté pour l'application de l'accord de Ouaga est respecté et que le désarmement est fait dans le temps, je pense qu'on peut tenir dans le délai. L'essentiel, c'est d'organiser des élections propres et crédibles. Mais, en ce qui nous concerne, nous mettrons tout en ?uvre pour tenir dans les dix mois.

N.V : Quelles sont alors les dispositions que vous prenez pour mettre vos militants en ordre de bataille ?
M.S.B : Cet interview participe déjà des actions que nous entendons mener pour sensibiliser les militants sur le terrain. Dès aujourd'hui, nous mettons en mission les responsables du parti (DDC, fédéraux, secrétaires de section et de base) pour préparer la réélection du président Gbagbo au premier tour de l'élection prochaine. A cet effet, une grande rencontre est convoquée par le président du parti lui-même, le Premier ministre Affi N'Guessan, pour le samedi 14 avril à 10h, au siège du parti à koumassi- Zone 4C. Je demande à tous d'être présents à cette rencontre au regard des informations à donner. Pour l'heure, nous demandons aux DDC, aux fédéraux et SG de section et de base de lire, de s'approprier l'accord de Ouaga et de l'expliquer à tous les militants. Notamment en ce qui concerne le chronogramme. Mais c'est notre devoir, en tant que secrétariat national chargé des élections, de leur rappeler ce qui est contenu dans l'accord. L'accord dit que, deux semaines après la formation du gouvernement, les audiences foraines commencent. Le gouvernement ayant été formé le samedi 7 avril 2007, les audiences foraines vont commencer le 21 avril 2007. A partir de cet instant, les fédéraux, les secrétaires de section et de base, et même les militants des bases doivent sensibiliser tous ceux qui n'ont pas de pièces pour qu'ils aillent aux audiences foraines. Le jour où les équipes foraines arriveront dans les villages, les responsables locaux des élections doivent les accompagner aux lieux des audiences. Ils doivent mettre en place des brigades de contrôle pour faire barrage à la fraude. L'accord dit clairement que c'est au lieu de naissance qu'on se fait enrôler. Il faudra donc être très vigilant. Il faudra veiller à ce que les Ivoiriens se déclarent Ivoiriens et que les étrangers se déclarent étrangers. Car c'est par -là que la fraude commence.
Nos responsables politiques devront également être présents sur les lieux au moment de l'inscription sur les listes électorales. L'accord dit que cette opération commence un mois après le début des audiences foraines. Ce qui situe le début de l'identification au 21 mai 2007. Là encore, il faudra sensibiliser les militants, mais, au-delà, l'ensemble des Ivoiriens pour qu'ils s'inscrivent sur les listes électorales. Car l'élection se gagne à partir des inscriptions sur les listes électorales et non seulement le jour où on dépose le bulletin dans l'urne. A nos responsables, nous demandons de faire en sorte que tous ceux qui sont en âge de voter s'inscrivent sur les listes électorales. Ça se fera de deux manières : il y a ceux qui sont sur les listes de 2000 ; ils viendront confirmer leur inscription. Il y a également les nouveaux majeurs. Ceux-là ont entre 18 et 25 ans. C'est tous ceux-là qui doivent être sensibilisés dès maintenant. C'est un acte extrêmement important. Il ne faudra pas attendre le dernier moment pour vouloir agir. J'insiste pour dire que les élections se préparent maintenant et se gagnent maintenant. Ce message s'adresse d'abord à nos militants et sympathisants ; il s'adresse également à tous ceux qui se sont battus pour défendre la République ; il s'adresse enfin aux patriotes de tous bords qui n'ont pas accepté cette guerre injuste et absurde et qui ont donc bombé leur poitrine pour défendre les institutions de la République. Après le crépitement des armes à feu, après la guerre politico-diplomatique, c'est maintenant le temps des élections. Les patriotes doivent, de ce fait, se mobiliser et se faire inscrire tous sur les listes électorales afin de prendre effectivement part aux élections pour réélire le président Gbagbo dès le premier tour. Ainsi, le combat de résistance qu'ils mènent depuis bientôt cinq ans n'aura pas été vain.

N.V : nous sommes à la fin de notre entretien.
M.S.B : L'essentiel a été déjà dit. Mais je voudrais ajouter que, pour nous, les élections à venir doivent être conduites de façon exemplaire pour que, désormais, les hommes politiques ivoiriens comprennent que, dans le jeu politique, les alternances au pouvoir sont possibles par les élections et non par les armes. Et que ceux qui ont pour seule stratégie de conquête du pouvoir les coups d'Etat renoncent à cela, car elle ne peut plus prospérer.
Au FPI, nous sommes les enfants des élections. Le président Gbagbo n'a de cesse de le répéter. Nous invitons les autres à devenir eux aussi des enfants des élections afin que la paix que nous sommes en droit d'attendre de l'accord de Ouaga soit une paix durable au profit du développement de notre pays.
Enfin, nous invitons nos DDC, nos fédéraux, nos secrétaires de section et de base à investir le terrain dès maintenant pour faire réélire le Président Gbagbo dès le premier tour afin qu'il mette enfin en route le programme pour lequel les Ivoiriens l'ont élu en 2000 et qui a été stoppé par la guerre.



Boga Sivori bogasivori@yahoo.fr

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