mercredi 11 avril 2007 par Le Patriote

Maintenant, palabre est finie en Côte d'Ivoire. On peut venir voir la famille à Abidjan et dans les villes de l'intérieur, sans risque de se faire arrêter et racketter par les forces de l'ordre. Ces propos sont de Ernest Sanou, de l'ethnie Bissa? de la région de Koupéla et cadre dans une société de fourniture de matériels informatiques. Assis autour d'un plat de brochettes de mouton, il sirote, en compagnie de ses amis, une bière locale dans un restaurant en plein air dans le Secteur 30? de Ouagadougou. A cette heure avancée de la nuit du samedi 7 au dimanche 8 avril, le débat porte sur la situation qui prévaut en Côte d'Ivoire depuis la signature le 4 mars dernier de l'accord politique inter ivoirien de Ouagadougou entre le camp présidentiel du chef de l'Etat Laurent Gbagbo et les Forces nouvelles du Premier ministre Guillaume Soro. Le débat évolue, au fil du temps. Et ils en arrivent à parler du nouveau gouvernement ivoirien. Sanou, l'Informaticien, affirme avoir de la famille en Côte d'Ivoire qu'il n'a plus revue depuis le début des hostilités en septembre 2002. Ses sentiments sont partagés par les autres occupants de la table qui saluent l'avènement de ce gouvernement censé ramener la paix dans un pays qu'ils adorent et qui, selon eux, n'aurait jamais dû connaître pareille situation. Idem pour les acteurs de la scène politique et les stars du monde culturel et artistique burkinabé interrogés sur le dossier. Adama Rouamba, Cinéaste- Réalisateur né à Oumé en 1969 de parents originaires de l'ex- Haute Volta et lauréat d'une trentaine de prix internationaux, se présente volontiers comme le pur fruit des deux cultures, ivoiro-burkinabé. Depuis la signature de l'accord politique et surtout après la formation du gouvernement du Premier ministre Guillaume Soro, L'artiste Rouamba est l'homme le plus heureux du Faso et il ne cache pas sa joie : Mon souhait le plus cher, c'est de pouvoir, un jour, repartir dans le pays qui m'a vu naître et où sont installés mes parents depuis 1949. Cela fait cinq ans que je ne les ai pas revus. Vous comprenez ma joie à l'idée que les choses se normalisent peu à peu en Côte d'Ivoire. Je crois au Premier ministre Guillaume Soro et en son gouvernement qui, j'en suis convaincu, réussira sa mission : ramener la paix dans le pays , affirme- t- il enthousiaste. Un avis également partagé par Adèle Nikiema, écrivain de la diaspora burkinabé installée en France et rentrée au pays pour deux semaines, précisément à Ouagadougou où elle a créé une entreprise de fournitures de matériels médicaux. Elle affirme avoir séjourné seulement deux semaines à Abidjan avant la guerre et serait heureuse d'y retourner pour y faire la promotion de son livre intitulé La mangeuse d'âmes sorti cette année en France aux éditions De la Lune . Elle espère seulement que tout va bien se passer et qu'on n'assistera plus jamais au réveil des vieux démons de la division en Côte d'Ivoire. Je suis sûre que les nouvelles autorités ivoiriennes sauront s'élever pour aller à l'essentiel qui est, l'identification des citoyens et organiser, dans des délais raisonnables, des élections incontestables, analyse-t-elle froidement dans le hall de l'hôtel Sofitel Ouaga 2000 où une consoeur de la presse burkinabé nous l'a présentée. La classe politique burkinabé ne demeure pas en reste. Le député de l'opposition, Salvador Yaméogo, frère cadet de Hermann Yaméogo et ancien ministre des Transports et du Tourisme, interrogé sur la situation ivoirienne, est plutôt très optimiste quant à une sortie heureuse de crise. Dans une interview qu'il nous a accordée, à ce sujet, il reste convaincu que la situation ira se normalisant avec l'action que va impulser le nouveau gouvernement de Soro à la lumière de l'accord de Ouaga. Il exprime sa foi aux membres du nouveau gouvernement qu'il affirme, du reste, connaître dans leur grande majorité, pour avoir vécu quinze années d'affilée en Côte d'Ivoire où il a exercé dans la filière Café- cacao. Vincent Zakané, Conseiller juridique du président du Faso et acteur des pourparlers du dialogue direct, aux côtés du ministre Djibril Bassolé, est du même avis que la plupart des Burkinabés interrogés à propos du gouvernement Soro. Après avoir accompagné, sur le plan juridique, les négociations de Ouaga, il ne doute pas que le processus enclenché à Ouaga aboutisse, dans les délais requis, sur le bout du tunnel qui conduira les Ivoiriens aux élections présidentielles tant souhaitées par tous, à l'horizon de février 2008. Les nouveaux dirigeants ivoiriens ont une responsabilité historique face au peuple de Côte d'ivoire, se contente-t-il de lâcher, dans un long soupir. En somme, dans leur immense majorité, les populations du Burkina Faso, ce pays voisin qui a abrité le direct inter ivoirien, fondent un grand espoir en l'action des nouvelles autorités gouvernementales sous la houlette du Premier ministre Guillaume Soro qui, à leurs yeux, est crédité d'un bon coefficient de positivité quant à sa capacité personnelle à réussir là où bien d'autres Premiers ministres ont échoué. Ce diplomate burkinabé, de passage à Ouagadougou, que nous avons rencontré, le dimanche dernier, lui, refuse de se prononcer clairement sur le nouveau gouvernement ivoirien. Il souhaite surtout que les Forces nouvelles s'attèlent à demeurer en alliance avec le PDCI de Henri Konan Bédié et le RDR de Alassane Dramane Ouattara. Pour la simple raison que, si l'objectif de cette transition de la dernière chance est de parvenir à l'organisation efficiente d'élections justes, transparentes, crédibles et démocratiques dans les délais requis, il n'en est pas moins vrai que le leader des Forces nouvelles a besoin de l'apport de tous, sans exception. Le scepticisme de ce diplomate porte surtout sur le manque de sincérité du camp présidentiel. Je doute de Gbagbo et de ses partisans. Ils ont concédé beaucoup de choses à Soro pour mieux l'appâter, le liquéfier et l'affaiblir définitivement aux yeux de ses hommes et de ses alliés , fait-il remarquer, l'air songeur. Le diplomate burkinabé reste convaincu que l'état de grâce entre Soro et Gbagbo durera, tout au plus, trois mois. Et que passé ce délai, le temps des accrocs sonnera. C'est en ce moment là, diagnostique- t-il, que Guillaume Soro aura plus que besoin du soutien de ses alliés du G7 pour faire face à la bourrasque frontiste. D'où la nécessaire consolidation des acquis de l'opposition civile et armée. Il aurait également souhaité que l'exigence de rajeunissement du personnel gouvernemental transparaisse clairement dans la composition du nouveau gouvernement. C'est pour lui, la seule manière d'apporter un plus à l'action gouvernementale présente et future. Cela aurait constitué un signal du nouveau Premier ministre à tout un chacun. Hélas ! J'ai l'impression qu'on a voulu faire du neuf avec du vieux. Il n'y a aucun signal fort . Mais, il n'en demeure pas moins optimiste comme la plupart de ses compatriotes.

Khristian Kara (Envoyé spécial)

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