jeudi 12 avril 2007 par Le Temps

Les populations de Vavoua ne sont pas encore au bout de leur peine. Elles continuent de vivre les affres de la guerre. Reportage.
Situé à 25 kilomètres de Vavoua, Bazra Natis, ce gros village, érigé en commune rurale, continue sa course vers l'abîme, depuis le déclenchement de la guerre, le 19 septembre 2002. Les autochtones, jadis majoritaires du point de vue du peuplement, sont devenus presque inexistants à cause du flux migratoire qui semble s'être accéléré. Un véritable centre des affaires avec le déversement de produits prohibés par la loi, la vente des parties génitales des êtres humains. Est-ce cela qui a fait de Bazra Natis, un véritable centre des affaires avec le déversement de produits prohibés par la loi, la vente des parties génitales des êtres humains et ce lieu qui attire tous ceux qui courent après des pouvoirs mystiques ? La vente des terrains est devenue monnaie courante à Bazra Natis sans que les propriétaires n'aient à redire. Les forêts classées des environs sont bradées à tour de bras. Les autochtones quant à eux sont obligés de se rendre à Bénoufla, Bodouasso, Mangourou pour avoir quelques portions de terre à cultiver. Pour ce qui concerne les derniers recensements AMU (Assurance Maladie universelle) et l'opération des audiences foraines, les chiffres suscitent beaucoup d'interrogations. Mais pour en savoir davantage, il faut bien entreprendre le voyage de Bazra Natis. Ce que nous avons fait. De Daloa à Vavoua, C'est plusieurs postes de contrôle, aussi bien tenus par les Forces de Défense et de Sécurité que par la rébellion, qu'il faut d'abord traverser. Le premier corridor des FDS est logé à Gbokora, un village situé à quelques kilomètres de Toroguhé, pour atteindre plus tard Madoguhé où se trouve un barrage de contrôle douanier qui, lui donne dos à un dispositif très important des FDS. A Zokoguhé, zone de confiance, se trouve un contingent de soldats Bangladeshi, à quelques encablures de Bonoufla. Je m'approche du dispositif mais les regards inquisiteurs des quelques passants me font changer d'avis. J'adopte une attitude désintéressée pour ensuite continuer mon chemin. A côté, le pont "Dé" constitue la propriété des rebelles qui y ont institué un corridor de fortune, qui s'adosse à un carrefour appelé carrefour SIFCI, où existent la police économique de la rébellion de Vavoua. Là sont réquisitionnés tous les passants. Ils doivent payer l'impôt. Ce corridor s'ouvre sur un village dénommé Dema, qui sert de porte d'entrée à Vavoua. C'est dans cette ville avec une forte population composée d'allogènes et d'allochtones que se pratiquent tous les trafics illicites. Parce qu'en fait, les différents bureaux de la fonction publique ont été occupés par les rebelles. La Gendarmerie de Vavoua est occupée par les Dozo. Le bureau de l'Agriculture est devenu un centre où sont délivrés les laissez-passer. Au T.P se trouve la police économique. Les bureaux de PTT et de la sous-préfecture sont détenus par les rebelles. Ce qui donne un nouveau visage à Vavoua. Trafics de produits prohibés.
A Vavoua, cigarettes, pattes dentifrices, pagnes, appareils électroménagers, motocyclettes et autres produits venus des pays voisins, sans contrôles douaniers y sont vendus à vils prix. Pour Jean B ressortissant de Bazra Natis, les rebelles contrôlent toutes les activités économiques de Vavoua. "Tout ce qu'il y a comme articles, nous confie-t-il, nous sont vendus par eux. Les commerçants sont obligés, en plus de ça, de payer des taxes. Ce qui est grave, c'est que sur le chemin de retour les difficultés ne manquent pas. Dès que tu finis tes courses et que tu prends le chemin du retour, surgissent les coupeurs de routes. Ils sont partout, dans la brousse et attendent les passagers qui se rendent dans leur campement. Quelquefois, ces gangsters t'obligent à acheter leurs fusils de type calibre 12. Il y a des gens qui sont fatigués de la guerre et qui ont envie de se débarrasser de leurs armes. Ceux-là viennent te demander d'acheter de gré ou de force leurs articles. Le pire, c'est qu'il y a aussi le commerce des organes humains " ! Sexe, têtes et autres organes humains commercialisés à Vavoua. Est-ce la guerre qui donne des idées diaboliques aux habitants de Vavoua ? La question mérite d'être posée. Surtout que cette localité jadis paisible et fréquentable est devenue le lieu de toutes les activités. Même les plus inimaginables. Il nous a fallu y faire un bref séjour, pour découvrir ce qui s'y passe. Ce vendredi 20 janvier, jour de marché à Bazra Natis, les populations s'activent à vite finir leur course et rentrer le plus tôt possible, pour éviter d'être agressées. Je fais semblant d'acheter quelque chose non loin des vendeurs de viande. Devant, j'aperçois une petite case en forme cubique. J'ai d'abord pensé à ces personnes qui prédisent l'avenir. Mais que nenni. Je m'approche et réalise que l'intérieur est noir. Je rebrousse chemin et quelques instants plus tard, un jeune homme s'approche de moi et me demande quelle partie du corps humain je voulais et pour quel genre (Féminin ou Masculin). La question, en même temps qu'elle m'irrite, me renseigne sur la nature des articles qui sont vendus dans la petite cabane. "Ce sont des têtes sèches ou des sexes qu'on vend, assure le curieux rabatteur. On peut te vendre tout ce que tu veux". Très vite, je quitte les lieux, pour rejoindre mon guide qui m'attendait pour retourner à Daloa, parce que je venais de percer un mystère qui risquait de me coûter cher. En réalité, on ne s'approche jamais de ce lieu, sans rien acheter.

Simplice Zahui
(Envoyé spécial à Vavoua)

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