mercredi 30 mai 2007 par Le Front

Le commerce aux grands carrefours et aux feux de singnalisation a pris de l'ampleur. A la vente des articles habituels d'utilité domestique, s'est ajoutée celle de volaille. De quoi s'interroger quand on sait que l'espace adapté pour cela demeure le marché.

Carrefour de Williamsville. L'embouteillage monstre en ce lieu semble faire l'affaire d'un jeune homme. Il se faufile entre les voitures qui essaient d'avancer en proposant sa marchandise aux conducteurs. L'échange rapide avec une dame voilée, qui porte des lunettes donne lieu à une transaction. L'heure n'est pas au long marchandage. Elle prend deux unités du produit, remet l'argent. Le commerçant s'éloigne vers l'automobiliste d'à côté. Lui, c'est Ahmed. Sa marchandise, de la volaille. Précisément des pintades. Les deux pintades qu'il vient de vendre portent le nombre de volailles vendues, ce jour, à huit. Un chiffre qui se trouve dans l'intervalle de ses ventes quotidiennes. Je vends sept à dix-sept pintades par jour. , confie-t-il l'air satisfait. Son chiffre d'affaires les vendredi et samedi double parfois. De vingt à trente volailles. A quelques mètres de là, se trouve Moustapha. L'air plus jeune. Vingt-sept ans environ. Moustapha connaît un sort différent de celui d'Ahmed. Au même moment, il dit n'avoir encore rien vendu.
Scénario idem à Attécoubé, boulevard de la paix. Près du siège de l'Onuci. Où de jeunes vendeurs de volailles abordent les automobilistes au feu rouge pour leur proposer leur marchandise. Chaque jour, Moustapha, Ahmed et les autres, tous des ressortissants du Niger, viennent à ces carrefours pour gagner de l'argent. Cela dès 7 heures du matin jusqu'à 18 heures et même plus. Ils proposent aux automobilistes et aux piétons des pintades à 3000 francs cfa et des poulets à 2500 francs cfa. Leur marché, c'est la rue. Leurs places favorites, les carrefours. Cependant, ces commerçants ambulants de volailles ne sont pas venus de nulle part. Ils ont un ?'patron''. C'est donc à juste titre qu'ils se font appeler des ?'apprentis''. Leur présence sur la route est une stratégie de vente basée sur la proximité avec le client. Il s'agit pour eux d'être le plus proches possible des consommateurs. Pour leur éviter les déplacements vers les marchés. Un effort qui pourrait décourager certains. Ils espèrent ainsi compenser le manque à gagner en restant au marché. En plus de cela, les coûts connaissent une légère baisse comparés à ceux du marché, où le prix subi les taxes payées à la municipalité. Ahmed et ses camarades, pour accroître leurs bénéfices, prennent des volailles dans le poulailler de leurs patrons installés au marché. Le patron d'Ahmed a une place dans le petit marché d'Adjamé habitat. Plus jeune et n'ayant pas les moyens de payer une place dans le marché, il vient au carrefour avec une partie du stock. Bravant la canicule et les risques d'accident, il compte rester là jusqu'à ce que sa situation s'améliore. Je travaille pour un vieux qui vend au petit marché d'habitat. Quand ça ne marche pas au marché, je viens ici avec quelques pintades pour les vendre. Ce n'est pas un plaisir pour moi de courir à longueur de journée sous ce soleil. Mais puisqu'au marché, ça ne va pas, mon patron n'envoie ici , explique-t-il. Le ?'vieux'' en question est Nigérien comme Ahmed. Et, selon ses propos il a lui aussi été ?'apprenti'' avant de s'installer à son propre compte. Aujourd'hui, il a une place au petit marché d'Adjamé habitat. Il reçoit des pintades en provenance de Korhogo ou du Mali des poulets de Coq Ivoire ou des fermes d'Agnibilékrou pour alimenter son poulailler.

Des volailles qui peuvent mourir à tout moment

Pendant que nous discutons avec Ahmed, un client, à pied, prend une pintade après un long moment d'hésitation. Non sans avoir signifié son inquiétude quant à la santé de la volaille. ?'Il arrive qu'elle meurt seulement un jour après qu'on l'a achetée'', a-t-il dit pour expliquer les raisons de sa méfiance. Qu'est-ce qui justifierait cela ? Une absence d'hygiène ? Un déficit alimentaire ? Ou encore la déshydratation après ces longs moments passés au soleil ? Ahmed dit ne pas être à mesure de nous le dire. Toutefois, il affirme que ce n'est certainement pas un problème de nourriture. Son argumentation. Certaines pintades viennent du Mali. Durant tout le temps que dure le voyage, elles ne mangent ni ne boivent. D'autant plus que celles qui n'ont pu être vendues, retournent au poulailler. Et là, elles peuvent s'alimenter , ajoute-t-il pour refuser la thèse de l'alimentation déficitaire. A ce problème qui menace sérieusement leur business, il y a les représailles des autorités. Si les agents du centre de commandement des opérations de sécurité (Cecos) les ont oubliés depuis quelque temps, ils ont passé le témoin au district. Selon Moustapha, ils sont pourchassés par les travailleurs de la circonscription. Chose qu'il s'explique difficilement. Souvent le district nous pourchasse comme des voleurs. Si on chasse celui qui travaille comme un vulgaire voleur, que fera-t-on de la personne qui vole effectivement ? , s'interroge-t-il.
En attendant que le district puisse les dissuader définitivement, les ?'apprentis'', ou vendeurs ambulants de volailles, Ahmed, Mousthapha et ses camarades continuent leur commerce. Au risque de se faire renverser par un automobiliste ou de tomber malade à cause du soleil. Evitant de ce fait, de longs déplacements à des personnes de diverses couches sociales. Des gens en voiture comme des piétons qui raffolent de la chair de volaille. Et nul ne pourra dire qu'ils ne participent pas à l'économie nationale.




CKK (stagiaire)

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