Les grands destins prennent toujours forme à partir des situations anodines. Alex I-Lemon, l'auteur de cet ouvrage intitulé "L'enfant de Dedeku Sar" relève cet état des faits pour offrir à l'appréciation du public, le mythe et les mystères qui entourent la naissance de Harris Memel-Fotê et toute sa vie. Certes, celui dont il s'agit repose désormais à Mopoyem dans la sous-préfecture de Dabou depuis le 11 mai, mais cela n'atténue pas la grandeur de l'homme.
Puisque Alex I-Lemon s'est appliqué à saisir l'immortalité du savant à travers ses ?uvres.
Avant toutes choses, l'auteur montre comment l'homme qui a contribué à l'élevation des intellectuels ivoiriens est venu au monde : "Sous un arbre de fortune, en pleine plantation communautaire (Dedeku Sar) du village de Mopoyem (Dabou) une femme donne vie à un enfant, autour des années 30. Cet enfant sera l'unique que le couple Fotê Memel et M'bo Nome aura eu. De santé fragile, le père ne le laissera pas s'adonner aux travaux champêtres, préférant pour lui, la direction de l'école des Blancs. Il voulait que son fils ressemble à son grand oncle Matafoué, chef de la tribu de Toupa, interlocuteur priviligié des colons dont il parlait quelques bribes de la langue".
"L'enfant de Dedeku Sar", est un livre-témoignages d'envergure exceptionnelle. Puisque celui à qui il est dédié a participé à sa rédaction. On note un bon nombre de ses intervations dans cette composition. A propos de sa date de naissance Harris Memel Fotê explique : "En 1940, l'Etat colonial avait décidé que j'étais né vers 1930. En 1946, l'Etat impérial avait décidé que j'étais né le 2 février 1930. Récemment pour des raisons informatiques, l'Etat national a décidé que tous les "né vers" sont considérés comme nés le ler janvier. Je suis de ce point de vue né le ler janvier 1930".
Fotê Memel Pierre, le père de Harris voulait que son fils grandisse par la tête en s'abreuvant à la mamelle de l'école des Blancs, afin que l'unique deviennent multitude. la conviction du père et l'engagement du fils n'ont pas trahi. Harris Memel Fotê a acquis la connaissance et le savoir à une dimension supérieure.
Très actif dans les mouvements de lutte. "Le diplôme d'études supérieures en poche à la fin de l'année scolaire, il prit la direction de Paris pour y préparer l'agrégation. Pour être candidat à l'agrégation de philo, il fallait avoir un certificat de science. Une série de matières scientifiques lui furent proposées, parmi lesquelles il choisit la génétique. Dans le même temps, avait lieu le congrès de l'Association des Elèves et Etudiants de Côte d'Ivoire en France (AEECF), branche de la Fédération des Etudiants d'Afrique Noire Francophone (FEANF). Il fut élu président. La toute première action de son bureau fut de faire adopter une motion contre le PDCI, qui voulait s'opposer à l'idée de l'exécutif fédéral de l'Afrique Occidentale Française, une option qui menait tout droit vers l'indépendance. La motion fut remise à Houphouet-Boigny, chef du parti et membre du gouvernement".
Dès lors, Harris Memel s'est senti interpellé. L'indépendance des colonies françaises ou leur maintien dans la communauté étaient à discuter.
Les étudiants africains optèrent pour l'indépendance. La Guinée de Sékou Touré aussi. Le choix du Président de la République de Guinée est mal ressenti par le général De Gaulle comme un terrible affront. On connaît la suite de l'histoire.
A l'occsion, Harris Memel Fotê révèle : "Après l'intervention du chargé d'affaires guinéen, les étudiants africains étaient face à leur responsabilité. Le moment tant attendu était venu. Il fallait être capable de joindre l'acte à la parole, car le dire seul ne suffit pas, il faut y adjoindre le faire.
Des témoignages poignants, des réflexions pointues, des révélations saisissantes assaisonnent cet ouvrage qui retrace la vie d'un homme de grande culture?.
Azo Vauguy
"L'enfant de Dedeku Sar", Alex I-Lemon ; Essai. Editions Réfondation. 226 pages