lundi 22 février 2010 par Le Nouveau Réveil

Au moment où la RTI de Brou Amessan organise un véritable feuilleton du 18 février 1992, comme pour blanchir comme neige les tenants de l'opposition d'alors, nous avons aussi revisité nos archives, et ce que les chefs de l'opposition d'alors disaient n'était pas moins grave que ce que disent aujourd'hui les leaders du RHDP. Encore que même en cas de dispersion des manifestations du FPI, il n'y avait jamais eu de mort d'homme. Aujourd'hui, ce n'est pas le cas. Juste un devoir de mémoire.
Le dimanche 30 juillet 1994, au stade municipal d'Agboville, Laurent Gbagbo, alors secrétaire général du FPI, animait un meeting devant ses partisans chauffés à blanc. Le PDCI-RDA était au pouvoir avec le Président Henri Konan Bédié. Le FPI était de l'opposition et Laurent Gbagbo revendiquait déjà le titre de leader de l'opposition. Le meeting qu'il a animé a été suivi par la presse de son parti. Et c'est dans les colonnes de "La voie N° 857 du 2 août 1994" que l'envoyé spécial Freedom Néruda, de son vrai nom Tiéti Roch d'Assomption (actuel Ambassadeur de la Côte d'Ivoire en Iran) que les propos de Laurent Gbagbo ont été rapportés. Parlant de l'administration, Laurent Gbagbo avait donné un mot d'ordre clair à ses militants : "Désormais, je donne l'ordre à tous les Ivoiriens et aux militants du FPI en particulier de désobéir à tout préfet et sous-préfet qui va se déclarer ouvertement militant d'un parti politique et agir en conséquence". Et notre confrère d'ajouter que des préfets comme ceux de Bouaké qui était alors N'ZI Paul David (actuel directeur de cabinet de Laurent Gbagbo) et de Gagnoa et certains de leurs collègues ou des sous-préfets ont pris, depuis quelques temps, la fâcheuse manie de déclarer ouvertement leur appartenance au PDCI et d'agir en conséquence, brimant les populations qui ne veulent plus entendre parler du vieux parti, le FPI, par la voix de son premier responsable, a décidé de réagir. D'aller en guerre contre ces responsables administratifs que Laurent Gbagbo traite, "indignes des Ivoiriens". Mieux, il les a invités, s'ils veulent se transformer en vulgaires recruteurs pour un parti, en l'occurrence le PDCI, "qu'ils viennent nous trouver dans l'arène du combat politique". Chacun sait, jusqu'où la désobéissance est allée dans les différentes régions de la Côte d'Ivoire et les dégâts qu'elle a causés.

La prophétie de la guerre civile et du génocide

Toujours au cours de ce même meeting, Laurent Gbagbo n'a pas hésité à déclarer que ce qui arrivait au Rwanda (la guerre civile, le génocide) pouvait arriver à la Côte d'Ivoire. "Voyez ce qui arrive au Rwanda. Au Liberia, on ne compte plus Ce n'est pas après qu'il faut intervenir comme ces hypocrites qui disent s'apitoyer sur le sort de ces populations ravagées par la guerre. Mais c'est avantsongez que cela peut arriver en Côte d'Ivoire. Car, s'il y a des hommes avec qui il est possible de discuter, aujourd'hui, au sens du PDCI, il y en a d'autres, par contre, qui sont prêts à l'affrontement. Et ceux-là, c'est maintenant qu'il faut les dénoncer. Parce qu'après, il sera bien tard. La guerre, on sait où elle commence, mais on ne sait pas où elle s'achève". Que sont devenus les différents accords ? On constate qu'il a fallu que le FPI et Laurent Gbagbo arrivent au pouvoir dans des conditions qu'il a lui-même jugées de calamiteuses pour que cette macabre prophétie se réalise.
De 1994 à 2010, soit en 16 ans, les contextes restent les mêmes, mais les acteurs ont changé. Le FPI fait pis que ce qu'il a dénoncé. Sinon, comment comprendre que le ministre de l'Intérieur, directeur local de campagne de Gbagbo, puisse donner l'ordre aux préfets et sous-préfets de se substituer aux CEI locales ? Comment comprendre que des ministres de la République puissent être des directeurs de campagne de Gbagbo et faire cette campagne avec les véhicules et les moyens de l'Etat ? Comment expliquer que des juges qui refusent de composer avec des fédéraux FPI puissent être mutés expressément ? Comment expliquer que des éléments des forces de l'ordre puissent être mutés pour s'être montrés républicains ? Que dire quand le chef d'état-major menace publiquement et nommément les leaders de l'opposition, en lieu et place des ministres de la Sécurité ou des leaders du parti au pouvoir ? Combien de préfets et sous-préfets aujourd'hui sont-ils le relais de campagne de Gbagbo sur le terrain ?

Eddy PEHE

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